lundi 16 juin 2008

Les anglophones des régions peinent à être servis dans leur langue

Les trois études publiées par le Commissariat aux langues officielles révèlent que ce sont les soins de santé et l'exode des jeunes qui inquiètent le plus les communautés anglophones en situation très minoritaire dans les régions du Québec.


Violaine Ballivy

La Presse

Anglophones minoritaires, francophones minoritaires, même combat? En partie. Trois enquêtes menées au Québec par le Commissariat aux langues officielles révèlent que, en région, les anglophones éprouvent des problèmes similaires à ceux des francophones du reste du Canada. Ils ont du mal à retenir leurs jeunes et à recevoir certains services dans leur langue.

Ainsi, contrairement à certaines idées reçues, les anglophones en situation très minoritaire auraient du mal à obtenir des soins de santé dans leur langue. «C'est quelque chose qui est souvent oublié, même qu'il y a une réticence à croire cela dans certains ordres de gouvernement», estime Graham Fraser, le commissaire aux langues officielles.

Le Commissariat a étudié les facteurs clés qui pourraient améliorer la vitalité des communautés anglophones de Québec, de la Basse-Côte-Nord et des Cantons-de-l'Est, pour lesquelles aucune étude du genre n'avait jamais été menée. «J'ai toujours pensé que c'était injuste de faire une comparaison entre, par exemple, la communauté anglophone de Montréal et la communauté francophone de Saint-Boniface (au Manitoba). J'ai toujours pensé que c'était une meilleure comparaison entre Saint-Boniface et Sherbrooke ou entre Québec et Halifax.»

En mesurant des communautés plus semblables, «il y a beaucoup de parallèles à faire entre les communautés francophones et anglophones en situation très minoritaire. Leurs défis sont très comparables. Les deux communautés considèrent que leurs besoins sont mal compris par les autorités.» Les trois études publiées vendredi révèlent que ce sont les soins de santé et l'exode des jeunes qui inquiètent le plus les communautés anglophones.

«Depuis 40 ans, on perd nos jeunes les plus instruits, qui partent chercher du travail là où l'anglais est la langue de la majorité. Maintenant, le groupe des 15-44 ans a moins d'instruction, d'emplois et de revenus que les francophones», se désole Rachel Garber, directrice générale de l'Association des Townshippers, en Estrie. «Dans ces conditions, nous devenons un fardeau pour le reste de la communauté (estrienne) et nous ne collaborons plus à son développement.»

Quel impact peut-on attendre de ces trois rapports? Le commissaire n'a ni le pouvoir ni le financement requis pour lancer des programmes de soutien aux communautés anglophones. Au mieux, ces études devraient permettre aux communautés de mieux faire valoir leurs revendications auprès des gouvernements, a relevé M. Fraser. Le gouvernement Harper doit annoncer sous peu les suites qu'il donnera au dernier plan d'action quinquennal sur les langues officielles, échu depuis le 31 mars.

Graham Fraser a relevé qu'il y avait eu des progrès ces dernières années, mais qu'il reste du travail à abattre. «Quand on a besoin de services de santé ou d'un accès à la justice, c'est qu'on est vulnérable, et quand on est vulnérable, on a besoin d'être servi dans sa langue.»

Le dernier recensement a démontré que la communauté anglophone est en croissance dans la province, mais cela ne suffit pas. «Il faut faire en sorte que les communautés aient un choix réel. On vit dans une société démocratique et je trouve regrettable que, dans une situation minoritaire, des Canadiens n'aient pas accès à certains services.»

Graham Fraser a par ailleurs relevé que le rapport Bouchard-Taylor présentait une analyse très fine, très respectueuse et très importante de la situation des anglophones dans la province. «J'ai recommandé à tous mes conseillers de le lire en détail. Sa substance est plus subtile et nuancée que plusieurs rapports dans ce domaine.»

Aucun commentaire: